| Sujet: Nous nous relèverons. | LIBRE CIEL D'AURORE Lun 10 Nov - 19:43 | |
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JE DRESSE LA tête. Là, au beau milieu de la Caverne du Ciel d'Aurore. Des bruits m'enveloppent, mais je reste assise, le regard droit devant moi, sans prêter attention à ce qui m'entoure. Je conviens à mon idée fixe, et, la gorge serrée par le chagrin, parviens à ne pas me décontenancer. Pourquoi m'a t-elle abandonnée ? Je n'avais pas besoin de ça. Mes babines tremblent, je baisse la tête, tentant de garder un semblant de dignité. Je laisse glisser mon regard le long du sol jusqu'au corps tacheté d'Abysse. Mon mentor. Mon digne mentor. Abysse des Espoirs Oubliés est... Morte. Pourquoi ai-je cette envie folle de hurler ? De hurler de tout mon être ? La vie suivait son cours, j'aspirais à la vie, j'apprenais, je croyais en moi, je croyais en eux, en nos ancêtres, et ils m'ont trahie. Ils m'ont trahie. Tous. TOUS. Et je me suis trahie moi-même en croyant à une vie idyllique, en pensant que tout irait bien pour toujours. J'avais bien tord. Elle est morte maintenant, et je ne sais même plus quoi faire. Est-ce vraiment à moi qu'elle parlait ? Est-ce vraiment sur moi qu'elle braquait son œil d'émeraude toutes ces lunes ? J'ai peine à croire. Ce ne peut pas être à moi, cette jeune chatte en qui personne ne croit, en qui tout le monde ne voit qu'une bouche de plus à nourrir, la petite chatte bruyante et joyeuse qui traînait dans les pattes de tout le monde deux Saisons plus tôt. C'est simplement impossible. Pourquoi moi ? Pourquoi pas un autre ? J'ignore que faire ! J'ai à nouveau envie d'hurler ! Je balaye les paires d'yeux qui m'entourent, détourne la tête en croisant ceux qui sont braqués sur moi, et soupire et retenant un violent sanglot. Je... Je me dois de montrer l'exemple.Je ne m'en sens pas capable. Je revois le regard d'Abysse, l'âme nostalgique. Sa voix retentit à mes oreilles, et me donne le courage de m'avancer de quelques pas. Je m'éclaircis la gorge, dresse les oreilles.
« Chats de la Tribu du Ciel d'Aurore. »
Vont-ils se moquer de moi ? Personne ne m'interromps. Ils lèvent des yeux inquiets vers moi, intrigués. À cet instant, et j'ignore pourquoi, j'essaye d'imaginer Abysse faisant la même chose, plantée là, au milieu de la Caverne, s'adressant à nos semblables. Elle n'aurait pas perdu la fois. Elle n'aurait jamais perdu la foi. Pourquoi le ferais-je ? Je me dois d'être sa fidèle successeur. Je ravale la boule qui m'obstrue la gorge en expirant, ma concentrant un instant sur le nuage de buée que je viens de lâcher, et finalement, dresse la tête, une lueur d'espoir brillant dans l'œil.
« Je suis ici aujourd'hui pour rendre hommage à notre dévouée, Abysse, » J'esquisse un sourire à son souvenir. Une larme manque de perler à mon œil. « Elle fut une excellente soigneuse. Peut-être ne fut-elle pas la meilleure. Mais je sais qu'on en parlera dans des Saisons. Elle marquera l'histoire, bien que le nom d'Abysse n'évoquera pas forcément ses meilleurs actes. Malgré sa "trahison", elle a toujours été juste, elle a toujours dirigé les nôtres de la meilleure des manières. Et je lui en serais éternellement reconnaissante. Vous souvenez-vous d'Onde du Chant des Geais, la petite chatte abandonnée que vous certains d'entre vous n'arrivaient pas à accepter ? Eh bien. Abysse m'a recueillie lorsque j'été perdue, m'a appris à m'accepter moi-même, m'a protégé. Et aujourd'hui, je sais qu'elle serait fière de me voir prendre sa relève. »
Je cille. Je suis presque fière de mon discours, seulement... Je n'en ai pas de raison. Je n'ai dis que la vérité, la pure et simple vérité. Personne ne m'a interrompu. Pas comme les porteuses m'ont interrompues lorsque j'étais petite, ou comme mon mentor chasse-proie me rectifiait. Non, là, seule ma voix résonne dans le silence pesant de la cave. Je relève les yeux tout en cillant. Je considère un instant ceux qui m'entourent, et puis, sans rien ajouter, marche jusqu'au corps d'Abysse, m'assois, et fourre mon museau dans le pelage doux et tacheté.
« Si quelqu'un veut parler, fais-je, la gorge nouée, qu'il le fasse. Ne nous retenons pas. »
Nous nous relèverons. Libre Ciel d'Aurore.
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| Sujet: Re: Nous nous relèverons. | LIBRE CIEL D'AURORE Dim 16 Nov - 14:33 | |
| « Les flocons tombaient déjà. Ils virevoltaient dans le ciel et tapissaient le sol d'un manteau blanc. Le spectacle était beau à voir mais cette saison n'était guère appréciée par les chats des Tribus. La Saison de l'Eau Gelée était arrivée plus tôt que prévue. Faucon se tenait assis, parmi la foule devant Onde du Chant des Geais, qui était désormais la nouvelle soigneuse de la Tribu du Ciel d'Aurore. Abysse avait en effet perdu sa vie pour retrouver la Tribu de la Chasse Éternelle , de même pour Eclat, la soigneuse de la Tribu de l'Eau du Givre. La queue enroulée autour de ses pattes et le regard dans le vague, le garde-caverne repensait au tragique événement qui avait touché sa Tribu et celle de sa défunte compagne. Toute la Tribu était en deuil. Abysse avait été une grande meneuse. A la mort d'Eclat, Faucon pensait que sa liaison avec elle ne serait jamais révélée. C'était sans compter que les deux Tribus tiennent pour responsable l'autre de la mort de sa soigneuse respective. Faucon pensait qu'Eclat n'aurait jamais tenté de tuer la soigneuse d'une Tribu adverse. Elle était trop juste pour faire ça. De plus, la défunte chatte souhaitait au contraire réunir les Tribus.
« Chats de la Tribu du Ciel d'Aurore. »
Faucon dressa l'oreille. Il reprit peu à peu conscience de l'endroit dans lequel il se trouvait; Il était dans le camp, parmi les siens en attendant le discours d'Onde. Le garde-caverne soupira et étira discrètement ses membres ankylosés. Chacun était en deuil pour sa soigneuse, mais lui l'était pour les deux.
« Je suis ici aujourd'hui pour rendre hommage à notre dévouée, Abysse. Elle fut une excellente soigneuse. Peut-être ne fut-elle pas la meilleure. Mais je sais qu'on en parlera dans des Saisons. Elle marquera l'histoire, bien que le nom d'Abysse n'évoquera pas forcément ses meilleurs actes. Malgré sa "trahison", elle a toujours été juste, elle a toujours dirigé les nôtres de la meilleure des manières. Et je lui en serais éternellement reconnaissante. Vous souvenez-vous d'Onde du Chant des Geais, la petite chatte abandonnée que vous certains d'entre vous n'arrivaient pas à accepter ? Eh bien. Abysse m'a recueillie lorsque j'été perdue, m'a appris à m'accepter moi-même, m'a protégé. Et aujourd'hui, je sais qu'elle serait fière de me voir prendre sa relève. »
Faucon hocha lentement la tête et cilla. Il respectait beaucoup son ancienne meneuse malgré que ses actes n'aient pas toujours été les meilleurs. Faucon ne connaissait pas bien Onde, mais il savait ce que pensaient certains chats de sa Tribu, et il ne voulait pas juger si vite quelqu'un.
« Si quelqu'un veut parler, qu'il le fasse. Ne nous retenons pas. »
Le garde-caverne hésita quelques instants à prendre la parole, puis se résigna. Il attendit juste qu'Onde finisse pour sortir dehors et s'aérer l'esprit. » |
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